QU'EST CE QUE LA BIPOLARITÉ?
La bipolarité, ou trouble bipolaire, est une maladie extrêmement fréquente, classée par l'OMS parmi les dix pathologies les plus invalidantes. Elle se déclare le plus souvent à l'adolescence ou chez l'adulte jeune et demande une prise en charge tout au long de la vie. On estime, en France, que 1 à 2,5% de la population est touchée (HAS), mais que ce chiffre serait probablement sous-évalué. La gravité tient au fait que la moitié des malades font au moins une tentative de suicide.
La maladie se traduit par l'alternance d'épisodes maniaques (agitation, idées de grandeur, dépenses inconsidérées, etc...) et d'épisodes dépressifs voire mélancoliques entrecoupés de périodes de rémission. Elle a des retentissements importants sur la vie quotidienne et professionnelle des patients et des proches.
Le diagnostic est difficile car la maladie se présente sous des aspects extrêmement variés dans la fréquence et l'intensité des épisodes. Il se passe parfois plus de dix ans avant que le diagnostic soit posé.
Le diagnostic ne peut être posé que par un médecin, le plus souvent un psychiatre. C'est d'autant plus important qu'il existe des traitements médicamenteux qui permettent de diminuer l'intensité des épisodes et leur fréquence. Malheureusement, aucuns d'entre eux ne permet d'obtenir la guérison.
RÔLE DU PSYCHANALYSTE
Le psychanalyste ne peut, en aucun cas, porter un diagnostic de bipolarité. Tout au plus, s'il avait un doute chez un de ses patients, pourrait-il lui suggérer de consulter un médecin, mais avec une extrême prudence. La mission du psychanalyse se dessine lorsque le patient qui le consulte est déjà diagnostiqué comme bipolaire et qu'il reçoit un traitement médicamenteux.
Il est peut être nécessaire de dire en préambule que le psychanalyste, s'il doit tenir compte de son époque, doit cependant se prémunir de certaines "modes". Il semble, en effet, que depuis quelques années, il est assez chic de parler à tout propos de bipolarité ou de se prétendre bipolaire. Auparavant, on parlait de PMD (psychose maniaco-dépressive), ce qui, convenons-en , est tout de même moins classe. On adore mettre des étiquettes pseudo-valorisantes sur les individus, comme par exemple la dénomination Asperger pour les autistes. Et la presse nous arrose régulièrement d'articles sur des bipolaires célèbres dont certains sont morts depuis longtemps, à une époque où la maladie n'avait pas encore été identifiée. Alors oui, ce diagnostic difficile est probablement sous-évalué, comme cela a été dit en introduction, mais il y a probablement des personnes étiquetées bipolaires par erreur. Ceci arrange peut-être le psychanalyste qui n'a que faire des étiquettes et qui ne s'occupera que des troubles de l'humeur d'une personne qui serait bipolaire. Chacun d'entre nous s'est senti, à certains moments, mélancolique et a eu, à d'autres moments, un sentiment d'euphorie.
Quoi qu'il en soit, la psychanalyse connait les états maniaco-dépressifs depuis le début. S. Freud, dans son observation de l'homme aux loups (déjà diagnostiqué à l'époque comme ayant un état maniaco-dépressif par le psychiatre E. Kaerpelin) note que sa "vie pleine d’activités et d’intérêt variés avait été à plusieurs reprises troublée par de graves crises de dépression ". Le même auteur, dans Deuil et mélancolie, indique que la mélancolie et la manie ont le même complexe auquel succombe la mélancolie mais dont triomphe la manie. Depuis, de nombreux psychanalystes ont travaillés sur cette pathologie, lui apportant une connaissance de plus en plus élaborée. Si la psychiatrie s'intéresse aux symptômes et propose, à juste titre, des médicaments pour les atténuer, le psychanalyse, lui, s'intéresse aux conséquences psychiques, aux ressentis du patient. Il va permettre au patient d'exprimer ce qui se passe et de trouver les moyens d'en diminuer les effets.
Il n'est pas question ici de décrire le déroulement d'une psychanalyse, d'autant que celle-ci, je le dirai souvent, est individuelle et propre à chaque patient. Chacun est singulier et, comme le dit J. Lacan, est "normal dans sa structure".
Pour conclure, provisoirement, nous dirons que le diagnostic de bipolarité est difficile et, de ce fait, il existe de nombreux cas de sous-diagnostics, et donc, par crainte de passer à coté, de surdiagnostics. Le problème est que le diagnostic de bipolarité sert un peu de fourre-tout, parce qu'il est mal défini, qu'il est moins stigmatisant que d'autres diagnostics de la sphère psychiatrique. C'est volontairement que je n'ai pas parlé des causes de la maladie tant elles sont floues: traumatisme de l'enfance, causes génétiques ou environnementales, etc... Bref, plus il y a de causes possibles moins on est sur.
CE QU'IL FAUT RETENIR:
Si vous êtes diagnostiqué bipolaire, vous tirerez beaucoup de bénéfices d'une psychanalyse qui vous aidera à mieux vivre avec cette maladie et complétera efficacement la thérapie médicamenteuse proposée par votre médecin.
Si vous croyez être bipolaire, vous devez impérativement consulter un médecin avant de débuter votre psychanalyse.
Si vous vivez avec une personne bipolaire et éprouvez certaines difficultés, vous pouvez vous adresser à votre psychanalyste pour vous faire aider.
Rappelez-vous que la psychanalyse va vous aider à être l'acteur principal de votre mieux-être.
Note: Cet article a été écrit en collaboration avec un médecin pour la partie médicale.
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